Quel suspens ! La suite ^^

 

 

Chapitre 6 : Rêves, regrets et traîtrises.
 
 

  

   Les vêtements tâchés de sang, Zélos transportait la jeune héroïne dans ses bras vers ses amis. Les yeux complètement clos, la bretteuse paraissait endormie. Le poison se propageait rapidement dans ses veines, et déjà elle crachait une bonne quantité de sang par la bouche et le nez. Parfois, des éclaboussures venaient atterrir sur la joue gauche de l’ex-Elu, mais il ne s’en soucia pas. A l’extérieur, tous les autres le regardaient courir avec la demie morte dans ses bras. Ses compagnons, restés perplexes devant la scène, mirent un peu de temps avant de le suivre à toute allure. Il courrait directement à l’auberge où il installa Emi dans un lit propre. L’aubergiste, ne se préoccupant même pas pour la demoiselle, le pria de sortir. « La ferme ! Il y a urgence ! » répondit-il. Raine, Dimitri, Colette et Lloyd, qui suivaient derrière, accoururent rapidement au chevet d’Emi afin d’entendre un premier diagnostic de l’experte soigneuse.

« - Le poison est déjà bien avancé dans son corps, elle risque d’en mourir dans quelques heures si nous ne faisons rien !
- Professeur !
   - Je vais essayer d’en extraire la grande majorité et j’identifierai ce poison. Ensuite vous irez chercher les ingrédients pour le sérum afin d’éliminer les derniers résidus dans son corps. Colette et Dimitri, j’aurai besoin de vous ; vous deux, veuillez sortir de la chambre. »
Lloyd et Zélos s’exécutèrent, pendant que Raine, Colette et Dimitri s’approchaient de la mourante. La porte fut refermée brusquement. Au dehors de la chambre, Lloyd restait assis sur une chaise, les yeux baissés vers le sol. Zélos, lui, continuait de fixer la porte, le regard complètement vide. Il n’avait même pas l’idée de changer ses vêtements ensanglantés. Dans la chambre, la patiente toussait des giclées du liquide rouge. « Il faut faire très vite : le poison a déjà peut-être atteint les poumons ! ». Raine prit une grande respiration : elle ne pouvait se servir en partie de la magie pour ce cas-ci. Elle va devoir prélever du sang, puis localiser dans le corps les membres affectés par le poison et enfin, l’extraire avec ses soins magiques. Colette lui tendit un petit scalpel et elle commença par faire une petite entaille au niveau de l’avant-bras. Elle préleva dans un petit tube une bonne quantité de sang, devenu assez épais et visqueux. Pendant qu’elle se concentrait sur une formule de localisation, Dimitri et Colette s’affolaient : Emi suffoquait, cherchant avec peine de l’air pour respirer. « Le sang commence à lui boucher ses vaisseaux sanguins, ce qui compresse le haut de la trachée ! Il faut lui faire une trachéotomie ! Dimitri, occupe-toi de la faire avec Colette ! ». Dimitri nettoya rapidement le scalpel et fit une petite entaille au niveau de la gorge. Colette lui apporta un tube fin en plastique, qu’il enfila dans le petit trou. Il enfonça le tube sans forcer dans la partie non compressée de la trachée, puis entendit un petit sifflotement : l’air parvenait dans ses poumons. Raine réussit à mettre sur pied son incantation de localisation…
Lloyd et Zélos, qui patientaient encore et encore au dehors de la chambre, s’étaient allongés sur un banc qui traînait dans le couloir. Zélos avait enfilé son pyjama et avait mis ses vêtements couverts de sang à la laverie de l’auberge. Sa veste rose pâle était reteinte en rouge à son arrivée dans le bâtiment hospitalier, ainsi que son pantalon blanc, dont toute la partie au niveau du bassin avait transpercé le tissu et du sang avait coulé sur ses cuisses à travers son bas. Quand à Lloyd, il avait retiré ses deux épées de ses hanches et les avait posé à côté de lui sur le banc en bois. Le dos contre le dossier, sa tête penchait légèrement vers la gauche et un mince filet de bave coulait le long de sa joue. « Cela fait plus de deux heures qu’ils sont là-dedans, pensa Zélos, j’espère qu’il n’est rien arrivé de grave à la petite Emi… ». A ce moment précis, Raine sorti de la chambre. L’ex-Elu releva alors sa tête, soutenue par ses mains, vers la guérisseuse.
« - Il y a eu quelques petites perturbations pendant l’opération, mais tout s’est bien passé : elle est presque tirée d’affaire. Mais comme je l’avais dit, il reste des résidus de poison : il faudra alors élaborer un antidote.
- Tu as pu identifier ce poison ? questionna Lloyd.
   - Non, c’est un nouveau genre de poison mais, de ce que j’ai pu étudier, il sur-active la circulation sanguine, vidant d’une bonne partie du sang le corps sujet à celui-ci, puis fait gonfler les hématies, ce qui bouche finalement les artères et les veines, causant la mort à coup sûr.
- Beurk…
   - Et là, comment va-t-elle ? demanda Zélos.
- Bien, elle dort. Comme la quasi-totalité du poison a été extrait, il faudra aller chercher les ingrédients nécessaires au sérum demain. J’établirai la liste cette nuit. En attendant, reposez-vous bien : demain risque d’être une journée très très longue. »
Lloyd et Zélos partirent vers leur chambre respective, tandis que Colette et Dimitri rangeaient et nettoyaient la chambre d’Emi. Raine regardait le poison extrait du sang dans une seringue. Elle secoua légèrement le flacon et le regarda à la lumière de la lune. « Tout était donc prémédité… »
 
   Une douce chaleur venait caresser les joues de la jeune endormie. Elle ouvrit péniblement les yeux. Une belle mélodie parvenait à ses oreilles, une mélodie qu’elle connaissait. Elle se leva. La mélodie cessa. Elle se trouvait dans une clairière que les rayons du soleil éclairaient singulièrement. L’herbe était fraîche, les arbres laissaient tomber la rosée fine du matin. « Tu es enfin réveillée ? ». Une voix paisible lui posa cette question, dans son dos. Elle se retourna tranquillement et aperçu un espèce de renard chat. Il avait une longue queue bleu vert se séparant en cinq. Son pelage était couleur sable feu, et ses pattes laissaient apparaître de petites flammes mauves. Un petit bruit de grelot se fit entendre. Un petit vent frais vint bouger les poils de cet animal si étrange, et pourtant si réconfortant et chaleureux.
« - Qui êtes-vous ?
- Ce n’est pas très important, répondit l’animal. Si je suis là, c’est pour t’aider. »
Le renard chat était assis sur ses pattes arrière sur une souche de chêne.
« - M’aider en quoi ? Je ne suis pas en train de rêver ?
- Si, bien sûr, tu rêves, sinon je ne serai pas à tes côtés. »
Emi s’approcha de l’être surnaturel, le regarda droit dans les yeux, et lui pinça gentiment les joues.
« - Il est choupiiiii !! cria-t-elle en le serrant contre elle.
- Argh ! La-lâche-moi !! Tu m’étouffes !! »
Emi desserra son étreinte. L’animal porta une de ses pattes sur sa gorge.
« - Je ne suis pas une vulgaire peluche, jeune demoiselle ! Je suis… »
Il s’arrêta de parler.
« - Vous êtes… ? Continuez votre phrase je vous prie…
- Peu m’importe… Je disais, avant d’être « sauvagement » interrompu, que je suis venu t’aider. Il s’avère que tu es l’une des rares personnes à venir d’un autre monde que le notre depuis la Réunification des deux mondes. Alors, en tant qu’esprit originel, je me dois de t’indiquer le chemin à prendre pour partir de Sylvaha’lla, si tu le désire.
   - Cela fait un bon moment que je suis ici, mes parents doivent beaucoup s’inquiéter à mon sujet…
- Tu me fais penser à une amie, qui se préoccupait toujours des autres avant soi… 
   - Qui ça ? Une renarde chat ?
L’esprit originel glissa de sa souche de chêne.
« - Non, pas du tout ! Je suis le seul de mon espèce !
- C’est dommage ! Tu es si mignon ! »
Le petit être soupira un coup avant de descendre gracieusement sur l’herbe humide. Il avança de quelques pas et se retourna : « Suis-moi ». Il se dirigea vers une sorte d’autel en pierre, situé au fond d’une autre petite clairière, beaucoup plus éclairée que celle où ils se trouvaient. Le chat renard aux pattes enflammées marchait tranquillement sur un sentier, suivi d’Emi. Plus la jeune fille s’approchait de la clairière où résidait l’autel, et plus elle se demandait si c’en était un. L’animal furtif, arrivé devant la grosse pierre, sauta sur le sommet et s’assis sur ses deux pattes arrière. Une petite brise fit bouger ses poils ainsi que les longs cheveux que la demoiselle. Les branches des arbres dansaient sous son effet. Une mélodie se fit entendre, la même que lorsqu’elle s’était réveillée. Cette mélodie était douce et envoûtante. On aurai presque dit une symphonie entre les feuilles qui se frottaient les unes contre les autres, et le bruissement du vent dans la clairière. Emi fredonna alors l’air ressemblant trait pour trait à la mélodie produite par la nature environnante. Elle en était sûre : elle connaissait la mélodie.
« - C’est une belle chanson n’est-ce pas ?
- Mmm ? Oh oui, très jolie. Je la connait très bien. Ma mère me la chantait souvent lorsque j’étais petite avant qu’elle…
   - Qu’elle ?
-…, répondit-elle en baissant la tête tristement.
   - Oh, je vois. Toutes mes condoléances…
- C’est bon. Elle est morte vers mes 6 ans, je ne garde d’elle que de bons souvenirs et je m’en suis remise. 
   - Comment s’appelait-elle ?
- Jun Reiga, de son nom de jeune fille, sinon Ayate. 
   - … Tu dois alors encore attendre un peu… »
L’esprit originel sauta sur son épaule droite avant qu’Emi ne prononce un mot et donna une petite tape sur son épaule…
Colette, restée aux côtés de la jeune malade, fut réveillée par des gesticulations. Elle ouvrit doucement les yeux et entendit des toussotements graves : Emi, dans un état second, s’était redressée sur son lit et crachait quelques filets de sang, les yeux toujours profondément clos. Colette tenta de la recoucher sur le matelas mou, et y parvint avec difficulté. Les draps auparavant blancs étaient de nouveau tachés de rouge pourpre. Colette remetta alors une serviette humide sur le front d’Emi, prise d’une subite poussée de fièvre. Elle changea également les draps. La pauvre malade donnait une impression de suffocation et de mouvement, sans doute totalement submergée dans ses pensées…
 
   La tête posée dans ses bras croisés sur la table, Raine dormait profondément. Même le bruit sourd d’un épais volume jeté sur le sol n’aurai pas pu la réveiller. Exténuée, elle rattrapait le sommeil volé par l’explosion des laboratoires. Cependant, qui ne nous dit pas que, dans cette tête bien pleine, les pensées se bousculent ? Personne. Pourtant, c’était bien le cas. « Pourquoi la jeune fille hybride a-t-elle détruit les laboratoires ? Pourquoi s’en est-elle prise à la jeune Emi ? Pourquoi vouloir à tout prix la tuer ? Pourquoi… », telles étaient les questions qui bouillonnaient dans son cerveau, en attente de réponses. Arrivé derrière elle, Dimitri déposa une couverture sur le dos de son maître. Il la regarda un instant, et saisit délicatement le petit morceau de papier où étaient écris les ingrédients. Dimitri fronça alors les sourcils et tapota avec son index ses lèvres sèches. Il se saisit silencieusement du stylo encore dans la main de la guérisseuse et barra certains mots de la liste, puis en réécrivait d’autres à côté. Après avoir réexaminé la feuille froissée, il acquiesça d’un signe de tête serein et la reposa sur la table de bois. Il lui tourna alors le dos, la regarda une dernière fois d’un regard fraternel, et monta prendre des nouvelles de la jeune patiente. Les escaliers grinçaient légèrement car le bois dont il était fait datait d’un certain bout de temps. Dans la chambre d’Emi, Colette dormait à ses côtés, assise sur une chaise mœlleuse, la tête posée sur le drap propre qu’elle venait de changer, ses bras posé près d’elle. Elle dormait elle aussi profondément. Il ferma la fenêtre à demi-ouverte de la pièce et tira les rideaux sombres. Il observa la malade, endormie elle aussi : ses yeux clignaient légèrement, ses joues étaient rouges et ses respirations se faisaient haletantes. Dimitri, près d’elle, la regardait silencieusement. Tout le monde dormait, sauf lui. Il aperçu à ce moment un petit objet par terre. Il s’accroupi pour le ramasser et, lorsqu’il se releva, se retrouva nez à nez avec le visage d’Emi. La jeune demoiselle, dans sa fièvre, s’était retournée du côté droit, sa serviette humide tomba près de son bras sur le lit. Dimitri resta planté là un bon moment, face à face avec la malade. Il pouvait aisément sentir son souffle chaud sur ses lèvres. La jeune fille bougea un peu son bras et fit tomber la serviette : cela ne dérangea pas du tout le prodige qui était devenu rouge, même dans la pénombre. Il se décida finalement à ramasser le tissu et replaça bien sur le lit la jeune Emi. Il retrempa le chiffon dans de l’eau fraîche et claire, et le lui reposa sur son front brûlant.
« -Alors toi aussi tu n’arrives pas à dormir ?
- Oui. »
Sur le pas de la porte, Lloyd attendait, les bras croisés. Dimitri fit le tour de Colette et alla le rejoindre. Il ferma doucement la porte pour ne pas les réveiller.
« - Il faut essayer de trouver le sommeil. J’ai l’impression que demain ne sera pas une journée de tout repos.
- Ne vous en faîtes pas pour moi, monsieur Lloyd, j’ai l’habitude avec le professeur Raine. Mon record a été de ne pas dormir pendant une semaine.
   -Tu as l’air de beaucoup apprécier le professeur Raine.
- Oui, je l’admire plutôt : être une femme demi-elfe et savoir se faire respecter en même temps en tant que guérisseuse connue dans Sylvaha’lla, cela relève presque du miracle.
   - Je dois avouer que Raine a une poigne de fer…
- Je suis d’accord avec vous ! »
Les deux souffres douleurs se racontèrent pendant plus d’une heure ce qu’ils ont enduré avec la guérisseuse endormie plus bas. Finalement, après moult bailleries, chacun retournèrent dans leur chambre respective et s’endormit d’un coup. Le lendemain matin, alors que le soleil était déjà haut dans l’horizon, le petit comité se regroupa une dernière fois pour récapituler les faits :
« - Vous devez, introduisa Raine, aller en priorité à Altamira : presque tous les ingrédients nécessaires au sérum s’y trouvent. De plus, Lloyd, Colette et Zélos, vous pourrez passer le bonjour de ma part et de celui de Génis à Régal, je suis sûre qu’il sera ravi de vous revoir.
- Oui, bien sûr professeur, nous n’y manquerons pas, répondit poliment l’ange aux yeux bleus.
   - Nous pourrons peut-être aussi voir Préséa ? Elle est sans doute restée avec lui.
- Ah, quelle charmante jeune fille qu’est Préséa, pensa à haute voix l’ex-Elu.
   - Dimitri, tu les accompagneras : il faut faire attention à ce que les ingrédients ne se détériorent pas pendant le voyage. Je resterai ici pour surveiller l’état de santé d’Emi et, au cas où, si la jeune fille hybride reviendrai finir son travail.
- Cette jeune fille s’appelle Harumi, ma belle infirmière, charma Zélos, avant de se prendre un crochet du droit venant de sa « belle infirmière ».
   - Peu importe… au fait, Zélos, j’ai récupéré le ptéroplan que tu avait laissé au garage ici, cela fait donc deux ptéroplans à votre disposition : vous les emprunterez pour aller plus vite à Altamira et pour revenir.
- O.K »
Lloyd adressa un signe de main à la guérisseuse avant de s’asseoir sur le premier ptéroplan qui se présentait devant lui. Colette s’assit derrière lui, Zélos et Dimitri sur le deuxième ptéroplan.
 
   « Ah ! Tu es revenue ? »
Emi ouvrit péniblement les yeux et se retrouva dans la clairière de la grosse pierre. Elle était placée dos à un arbre, assise dans l’herbe, les genoux pliés sur les côtés. Le petit chat renard avait ses deux avants sur le torse de la jeune fille, et ses multiples queues bleutées gigotaient derrière lui. Il regarda Emi tendrement, avant que celle-ci ne se relève.
« -Dis moi, petit renard…
- Je préfère que tu m’appelles « esprit originel ».
    - D’accord, esprit originel… Euh… C’est quoi un esprit originel ?
- Un esprit originel est un esprit tirant ses pouvoirs d’un des éléments originel de la nature.
   - O.K, et toi tu es quoi comme esprit originel ?
-… Je te le dirai plus tard, pour le moment cela importe peu. Que voulais-tu savoir ?
   - Eh bien, je suis dans un rêve, certes, mais que fais-tu ici ? Et où sommes-nous ?
- Comme je te l’avais dit, je suis venu ici dans ton rêve pour t’aider à partir de Sylvaha’lla, mais seulement si tu le désires. En ce qui concerne la question du « où », on est dans la forêt de Trient, après le village d’Heimdall. Je suppose que tu ne connais pas cet endroit mais il jouera un grand rôle dans la suite de ta décision… »
Emi s’approcha de la stèle et posé sa main dessus. Elle réfléchis quelques secondes, les yeux fermés. « J’ai pris ma décision, esprit originel… »
Pendant ce temps, en plein air :
« - Je te dit que c’est moi qui vais gagner !
- Non, c’est moi ! Colette est plus légère que l’autre avec toi !
   - C’est qui qu’on traite de « l’autre avec toi » ??
- Arrêtez de vous disputez et de faire cette course stupide ou alors je vous fais tous tomber de vos ptéroplans !!! »
L’air surpris, les trois garçons regardèrent Colette, étonnés de sa réaction, elle qui est si douce et tranquille d’habitude.
« - Colette ? D’accord, on arrête, n’est ce pas Zélos ?
- Ou-oui Lloyd, on arrête. »
Sur ces mots, les deux ptéroplans stoppèrent net au dessus de la ville d’Altamira. Ils atterrirent tranquillement au sol et rangèrent les véhicules. Colette et Dimitri ouvrèrent la marche, tandis que Zélos s’approchait de Lloyd : « C’est quand même moi qui est arrivé le premier à Altamira ». Il accéléra le pas pour rejoindre les deux autres devant et laissa le jeune épéiste à l’arrière, rouge de colère. La grande ville balnéaire d’Altamira resplendissait plus que jamais : la plage était noire de monde à cette heure-ci, des enfants courraient prendre le train élémentaire en direction du parc d’attraction, et la grande tour de la société Lézaréno surplombait le tout. Quelques filles déguisées en lapin renseignaient les passants qui sortaient de l’hôtel de la ville. Au loin on percevait le casino dont les portes étaient fermées. Les trois amis avancèrent directement vers la tour de la société, tandis que Dimitri était ébloui face à tant de divertissements présents en un même endroit et de la beauté de la ville. Colette dû le tirer par le col de sa veste d’étudiant en médecine pour qu’il les suive. Le petit groupe prit le train élémentaire, bondé de monde, et en, particulier de bambins. « Cela ne vous dérange pas que je dépose ces enfants au parc d’attraction avant de vous emmener à la société ? » questionna le mécanicien à Colette. Celle-ci acquiesça que non.
« -Ca se voit que tu n’est pas collé à côté d’un môme qui se mouche sur tes vêtements, répliqua Zélos, sur lequel un petit garçon d’environ 3 ans se mouchait effectivement sur sa veste rose pâle. Mais lâche-moi ! Va voir ta mère !
- Ouuuiiiiiiiiinnnnnnn !!! Maman !! La zolie fille aux cheveux roses me crie dessus !
   - Moi ?! Une fille ?!
- Viens là mon chéri, réconforta la mère du petit. Et vous, sale hypocrite, prenez ça !
   - Mais aïe ! J’en ai marre de me faire taper dessus moi ! Vivement que tout redevienne comme avant ! » bouda l’ex-Elu, les bras croisés, la trace de la main droite de la mère du garçonnet sur la joue.
Après moult gamins qui gesticulaient, sautaient, courraient dans le train élémentaire à côté de lui, tous descendirent au parc, après avoir bien pris soin d’écraser leurs pieds avant de partir. « Je hais les enfants » bougonna le rouquin. Le mécanicien s’excusa de leur attitude auprès de lui, même si ce n’était pas de sa faute. Zélos le lui fit remarquer et il les emmena directement au pied de la tour de la société. La société Lézaréno est une grande société d’import-export connue dans le monde entier de Sylvaha’lla. La grande majorité des marchandises les plus populaires étaient traitées et examinées dans cette imposante tour avant d’être stockées, prête à l’envoi. De plus, les trois Héros de la Régénération connaissent très bien le président de la société, qui n’est autre que Régal Bryant, autrefois accusé du meurtre d’Alicia Combatir, la jeune sœur de Préséa. Ils passèrent les portes de la tour et entrèrent dans le hall où un vieux pionçait derrière son comptoir.
« - Euh… Bonjour monsieur…
- Oh là ! Eh ! Oh ! Mmm… Oh ! Bonjour mademoiselle, dit le vieux en rajustant ses lunettes. Que puis-je faire pour vous ?
   - Désolée de vous avoir réveillé mais mes amis et moi voudrions voir le président de la société, Régal Bryant, s’il vous plait.
- M.Bryant… Oh ! Oui, il est dans son bureau.
   - Merci beaucoup. »
Le comité prit la direction de l’ascenseur, avant que le vieux ne les interpelle :
« - Il est au dernier étage, j’avais oublié de vous le préciser.
- Oh, nous le savions : nous sommes ses amis. »
Le vieux les regarda monter, un air ébahi. Ses lunettes tombèrent de son nez.
 
   Avec vue sur la mer, dans une pièce très spacieuse, un homme aux longs cheveux bleus noués en une queue en arrière étudiait des papiers. Le bureau était très éclairé car tout un pan de mur était couvert de vitres. Le bureau était peu décoré, juste quelques meubles par-ci, par-là (à l’occurrence : une bibliothèque murale en hêtre, deux commodes en sapin, un bureau en chêne et un range document en acier). Quelques chaises étaient disposées en face du bureau. Celui-ci aussi était peu décoré : un presse papier dans un angle, une lampe dans l’autre, une pile de dossier à droite, et deux photos à gauche. Sa main gauche soutenait sa tête, dans laquelle s’accumulaient les informations. L’homme soupira et posa la feuille en face de lui. Il se redressa sur le dossier de sa chaise et se retourna vers l’océan bleu. Il croisa ses mains devant lui, et son regard se perdit dans les flots… quand on vient frapper à sa porte. Il n’y prêta pas attention et repartit dans ses pensées, quand il reconnu des voix familières :
« - Tu es sûr qu’il est là ? Tu ne crois pas qu’il est plutôt parti piquer une tête dans le grand bleu ?
- Si le vieil homme en bas l’aura vu, il le nous aura dit avant qu’on ne monte.
   - Bien, alors on n’a qu’à rentrer en forçant la porte…
- Mais si il est vraiment là, ce sera malpoli de notre part d’entrer à l’improviste, et… »
La porte s’ouvrit d’un coup, sans faire bouger l’homme de son fauteuil. « J’en étais sûr que c’était vous, mes chers amis ». Il fit pivoter son fauteuil en face de ses amis. « Alors vous voyez qu’il était là ! Ah ! J’avais raison ! se vanta Zélos, par contre, je suis désolé pour la porte, Régal… ». Le dénommé Régal Bryant leur adressa un sourire avant de leur proposer un siège.
« - Comment allez-vous mes amis ?
- Oh, très bien, répondit Colette, et toi ?
   - Les affaires, encore et toujours les affaires… Heureusement que Préséa m’aide parfois, sinon je croulerai sous les piles de dossiers.
- Oui, c’est vrai : où est Préséa ? questionna Lloyd.
   - Elle est dans la réserve : elle trie quelques anciennes demandes aux archives. Quelle est la venue de votre visite mes amis ?
- Euh… Et bien…, commença Dimitri, qui s’était tue pendant les retrouvailles des cinq anciens compagnons de voyage, une jeune protégée de monsieur Zélos a été grièvement blessée, enfin empoisonnée, et elle a besoin de certaines substances que, d’après le professeur Raine, vous aurez en votre possession.
   - Je ne savais pas que Zélos, le Don Juan de ces dames, avait une prit une protégée sous son aile, ironisa Régal.
- C’est une très très longue histoire, et ce n’est ni le lieu, ni le moment de la raconter, esquiva l’ex-Elu, le visage écarlate.
   - En clair, profita Lloyd, c’est presque sa petite amie !
- J’aurai bien aimé, détourna Zélos, mais ce n’est pas le cas. Bon, revenons à nos moutons : tu peux nous aider ?
   - Oui oui bien sûr. Cela me fait plaisir de vous revoir, je suis sûr qu’à Préséa aussi. Allez la voir aux archives à l’étage du dessous : elle saura mieux vous renseignez que moi.
- Merci beaucoup Régal, dit Colette. Au fait, Raine et Génis te passe le bonjour également. »
Régal lui adressa un sourire, qui signifiait « merci, passe leur le bonjour de ma part aussi ».
Le petit groupe reprit alors l’ascenseur, après avoir dit au revoir comme il se doit à leur ami (autrement dit, ils ont engagés un petit combat entre amis en plein bureau ! enfin, Lloyd et Zélos, Colette et Dimitri étaient restés abasourdis par une telle attitude). Ils descendirent donc deux étages, et les portes s’ouvrirent sur une grande pièce peu éclairée. Des tas et des tas de cartons étaient empilés les uns sur les autres dans tous les recoins, certaines piles touchaient même le plafond ! Les deux bureaux qui étaient disposés là où il y avait de la place étaient couvert de feuilles en tout genre : des grandes, des petites, des moyennes, des rectangulaires, des triangulaires, des circulaires, des roses, des blanches, des noires, des bleues… En tout genre. Les armoires murales étaient en ébène et ne possédaient pas de portes. On les voyaient à peine dans la pénombre, car seules trois-quatre lampes étaient éparpillées dans la salle des archives. Un grand fracas se fit entendre dès leur arrivée : Colette, qui ne voyait pas où elle mettait les pieds, avait glissée sur une feuille par terre et s’était étalée de tout son long dans la salle. « Oh ! Des visiteurs ? ». Une petite silhouette approcha du comité et aida Colette à se relever.
« - Oh, merci Préséa ! Je suis ravie de te revoir ! Comment vas-tu ?
- Je vais bien, merci, lui répondit-elle en lui adressant un charmant sourire, et toi ?
   - Bien. Que fais-tu ici ? Régal nous a dit que tu travaillais en ce moment ici.
- Oui, je l’aide à classer les commandes renvoyées ou non envoyées. Tu es venu avec Lloyd et Zélos ! Quel plaisir !
   - Bonjour Préséa.
- Bonjour ma belle.
   - Euh… Bonjour, fit Dimitri, devenu rouge.
- Un nouveau co-équipier ? Il se passe quelque chose ?
   - Et bien… Oui, en effet : une jeune fille a été sérieusement empoisonnée. Raine a réussi à la tirer d’affaire mais elle nous a demandée de venir chercher les ingrédients d’un sérum. On a été voir Régal juste avant et il nous a dit que tu nous pourrai nous aider.
- Vous avez une liste de ce qu’il vous faut ?
   - Oui, la voilà, dit Dimitri en tendant le morceau de papier qu’il avait lui-même rectifié la veille.
- Mmm… Une pierre de lune, de la poudre de calcaire, des feuilles de lin, du sang de sirène et un cheveu de demi-elfe… Je dois pouvoir trouver cela en moins de deux : plusieurs commandes du laboratoire de magie de Meltokio nous ont été retournées il n’y a pas longtemps, et tous les ingrédients de la liste y étaient répertoriés. Ah ! Voilà ! Tout ce dont vous avez besoin se trouve dans ce colis. Servez-vous. »
 
   La fenêtre ouverte de la chambre laissait passer une fine brise fraîche dans la chambre d’Emi. Celle-ci, les yeux toujours clos, dormait profondément. Sa fièvre avait baissée et son état était stable depuis le départ de ses compagnons. Les rideaux voilés flottaient dans la pièce clame. Raine s’était installée au bureau de la chambre et lisait un des volumes présentés dans la petite bibliothèque à droite. Elle était de dos par rapport à Emi mais se retournait quelques fois et prenait son pouls. Après une énième examination, elle retourna à sa lecture. Cependant, elle ne fit pas attention à la silhouette mauve qui la regardait au dehors. Harumi poussa silencieusement les volets et s’accroupit sur le rebord de la fenêtre. Elle entra sans bruit dans la chambre et se positionna à côté d’Emi. Elle l’observa un moment… Quand Raine lui saisit les deux poignets par l’arrière :
« - Argh !
- Harumi, je présume ?
   -… Oui, c’est moi…
- Que fais-tu ici ?
   -… Je suis venue voir Emi… N’ai-je pas le droit ?
- Après ce que tu viens de faire, tu as le culot de revenir la voir, comme si de rien n’était ?
   -… C’est beaucoup plus compliqué que vous le croyez… »
La porte s’ouvrit d’un coup sec.
« - Raine, on est reven… Toi ! s’écria Lloyd en sortant ses épées, imité par ses compagnons.
-…
   - On dirai que vous arrivez tous au bon moment, dit calmement Raine. Elle a l’air de vouloir nous donner quelques explications… »
Raine lâcha Harumi, le comité rangea ses armes et tous entrèrent dans la chambre pour écouter ce que la jeune empoisonneuse avait à dire.
« -… Pour commencer, je m’excuse des actes que j’ai commis… Je n’ai jamais voulu tout cela… On m’y a obligé… Enfin, on m’a manipulé sans que je m’en aperçoive pour commettre ces crimes…
- Qui t’a manipulé ? questionna Zélos.
   -… Une magicienne… Du nom de Larissa… C’est elle qui a tout orchestré depuis le début à Meltokio… Elle m’a libéré des scientifiques cupides et avides de connaissance et m’a dit de lui rendre un service… Celui de tuer le responsable de mon apparence actuelle… Mon père… Puis je me suis vengée de tous les scientifiques de Sybak en détruisant leurs expériences malfaisantes… hier, quand je suis retournée voir Larissa, elle m’a dit qu’elle n’avait plus besoin de moi… Maintenant je regrette… »
Sur ces mots, Raine injecta le sérum dans le corps d’Emi qu’elle avait préparée pendant qu’Harumi parlait. Emi s’éveilla alors doucement et se dressa péniblement sur son lit lorsque la jeune hybride prit une fois de plus la parole :

« Larissa est très dangereuse… Et elle trame un complot sur le monde de Sylvaha’lla… Qu’elle a les moyens de faire aboutir… »  

 

 




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